Eloléa,
Rosy24 a écrit :Je sais tout à fait ce que j'attends c'est quelqu'un qui m'explique tout ça, qui me dise "si vous prenez un traitement..." et "si vous ne prenez pas de traitement".
En fait, la principale difficulté avec la sep est qu'on dispose certes d'une chiée de connaissances la concernant, mais que ces connaissances sont toutes d'ordre purement statistique et ne sont par conséquent (pour ainsi dire) d'aucune aide pour ce qui est du cas particulier de chaque patient.
Ainsi pour ce qui est des traitements : lors de chaque étude de phase III (randomisée double aveugle, molécule à tester contre un plan B qui est soit un placebo, soit plus généralement, aujourd'hui, une molécule déjà bien connue, comme le sont par exemple l'interféron bêta ou le diméthylfumarate) de chacun des traitements de fond actuellement proposés contre la sep, on arrive à démontrer que les quelques dizaines de patients à qui on a administré la nouvelle molécule (bras A), s'en sont
en général mieux sortis que ceux à qui on a administré le plan B (bras B).
Tout est dans ce "en général" : on évite d'insister trop lourdement sur le fait qu'au sein du bras B, certains s'en sont vachement mieux sortis que la plupart du bras A. C'est pourtant une observation qu'on peut faire pour chacune de ces études, sans exception. On l'explique par la variabilité et l'imprévisibilité considérables, d'un patient à l'autre, de la maladie, mais il reste qu'on se heurte systématiquement à l'impossibilité de déterminer à l'avance comment tel patient va réagir à telle molécule (et, plus généralement, à la profonde vanité de tenter de dresser quelque pronostic individuel que ce soit).
Il me semble très, très improbable, pour dire le moins, d'arriver à tomber sur un neuro qui parviendrait -- autrement que sur un occasionnel coup de chance --, à obtenir pour le cas particulier de tel ou tel de ses patients, ce que les neuros engagés dans les études de phase III (on ne prend pourtant pas les plus mauvais...) sont eux-mêmes incapables d'atteindre. D'où découle une de mes expressions favorites, concernant sep et neuros : "le doigt mouillé du neurologue".
C'est beaucoup plus sur la détection et la prise en charge des effets indésirables de tel ou tel traitement que le praticien aura des connaissances un peu plus stables à faire valoir ; mais pour ce qui est de l'évolution de la maladie, heu comment dire...
Qui me donne son opinion sur mon état par rapport à ce qu'il a vu, un neuro qui a du recul de l'expérience, qui en a vu des patients, même si j'ai bien compris que chaque cas est un cas et qu'il est difficile de se prononcer.
"Difficile"

?
Il y a une question que j'ai systématiquement oublié de poser à mon bon dr Gout (l'acte manqué dans toute sa splendeur), c'est sur la foi de quelle diablerie il avait osé pronostiquer, quelques mois seulement après mon diagnostic (ça se passait encore à la Salpé), que ma sclérose en plaques serait "très vraisemblablement bénigne" -- alors que je sortais d'une poussée d'une violence et d'une durée rares, avec des lésions tellement nombreuses qu'elles avaient déjà été détectées au scanner (!), avec atteintes conjointes du cervelet et du faisceau pyramidal, autrement dit des trucs qui, dans tous les manuels de la sep, te cochent au marqueur indélébile la case
mauvais pronostic (statistique). C'était une des raisons qui expliquent pourquoi je m'étais intéressé à ce que "la science" avait à raconter sur la sep, j'ai notamment le
McAlpine's Multiple Sclerosis à la maison (comme livre de chevet, il commence à être bien usé) : je n'y ai pas trouvé grand chose de consistant pour me permettre de supposer que, jeune diagnostiqué, j'aurais pu échapper à un pronostic aussi défavorable. Quelques "peut-être", "éventuellement", "pourquoi pas ?", mais guère plus. Mes lectures m'ont beaucoup plus convaincu que si mon diagnostic avait lieu aujourd'hui (mais au même âge que celui que j'avais à l'époque), je serais un parfait candidat pour me faire administrer d'emblée un traitement de seconde ligne. J'irai même plus loin : si on ne me proposait rien de tel, j'insisterais lourdement pour du seconde ligne d'emblée (je ne jure que par le natalizumab), alors que les quelques décennies qui se sont écoulées depuis, ont largement eu le temps de démontrer que cela n'aurait servi à rien -- on se serait juste extasié devant l'efficacité du traitement

.
Je n'attends pas spécialement qu'il me dise ce que j'ai envie d'entendre. Mais plutôt qu'il soit honnête, qu'il m'explique tout et qu'il me laisse choisir.
Un neuro honnête, c'est un neuro qui commence par admettre à quel point il est largué par la maladie, ce qui ne veut pas dire qu'il ne peut rien faire pour toi.
J'apprécie beaucoup ce passage :
https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/vid ... de-lourdes. Regarde la vidéo en entier (elle ne dure jamais que deux minutes), mais passe du temps sur l'intervention de Catherine Lubetzki (à partir de 0:55) : elle était encore une jeune neuro pleine d'avenir à l'époque, son excellence est difficilement discutable et en même temps, pour ce que j'en ressens, c'est exactement comme ça qu'un neuro devrait s'adresser à ses patients. Qu'en penses-tu ?
Car là j'ai beaucoup plus d'informations grâce à toi, et grâce à vous ici sur ce forum que grâce à ma neurologue (qui est adorable... mais adorable quoi... c'est une petite jeune très douce et délicate mais peut-être trop).
J'ai plus compris ce que j'avais à lire ce que tu m'expliquais qu'avec les 30min passées avec la neuro.
Le problème de ta neuro n'est pas tant sa jeunesse, que le fait objectif qu'en trente minutes de consultation, il n'est juste pas possible, même pour les meilleurs des meilleurs, de répondre à toutes les questions de ton patient...
Et son infirmière est adorable mais à part me parler uniquement du traitement, sans me laisser parler et me dire "on aime pas beaucoup les gens qui ne se traitent pas"... bah en fait... c'est pas ça un médecin ou personnel soignant pour moi. Pas d'échange, pas d'écoute.
Ce qu'elle te dit est pourtant fort pertinent : la principale compétence des neuros, vis à vis de la sep, consistant à gérer les effets indésirables des traitements, si pas de traitement, pas d'effet indésirable, le neuro ne sert plus à grand chose.
Au cours des quinze ou vingt dernières années, je ne suis allé que deux fois en consultation neuro. Ma dernière IRM cérébrale remonte à 2016, mon dernier rendez-vous en neurologie à 2018. Qu'attends-tu du neuro, pour ce qui est de la prise en charge de ta sep ? Quelques interventions fort pertinentes que j'ai pu lire dans ce topic concernaient notamment l'orientation vers de la rééducation, etc., mais en quoi aurais-tu besoin d'un neurologue pour ça, un simple généraliste ne s'acquitterait-il pas aussi bien d'une telle demande ?
A bientôt,
Jean-Philippe